Des millions de Français sont concernés par la désertification médicale. D’après les agences régionales de santé (ARS), les deux tiers de la population vivent dans une zone où la densité des généralistes est très insuffisante et un quart dans une zone dite d’intervention prioritaire. Face à l’urgence et à l’absence de réponse de l’État, des collectivités, des maires tentent d’apporter des solutions concrètes.
Pourquoi l’État, à qui incombe la politique de santé, ne s’attache-t-il pas à réduire les inégalités d’accès aux soins ? Pire, pourquoi ces inégalités semblent-elles résulter de décisions sciemment génératrices de zones blanches médicales ?
Ces zones concernent souvent des espaces ruraux mais aussi certaines villes moyennes ou des zones périurbaines qui subissent la combinaison, pendant des années, entre la réduction du nombre d’étudiants admis en médecine, les départs en retraite, la fermeture des hôpitaux de proximité, le tout alors que le volume de soins est en hausse. 63 % des Français ont déjà renoncé à des soins en raison des délais d’attente et des distances à parcourir.
Délitement du service public de santé
«Avec l’ONDAM, c’est-à-dire un financement fixé à l’avance et non en fonction des besoins, avec la création du numerus clausus, avec la loi HPST (Hôpital Patient Santé Territoire) du 21 juillet 2009, nous sommes bel et bien dans un processus de suppression de service public », relève le Dr Fabien Cohen, chirurgien et membre de la commission Santé/Protection sociale du PCF.
«75000 lits ont été fermés. Les salaires n’ont pas augmenté et l’attrait du privé a aggravé le phénomène de désertification médicale. » Le virage ambulatoire déplace la question d’accès aux soins sur la médecine de ville, alors qu’il manque le personnel aussi hors des murs de l’hôpital pour suivre ces patients chez eux. Le transfert du numerus clausus de l’ordre des médecins vers les universités déplace seulement le problème, car les universités font en fonction de leur capacité à former. Collectifs de médecins, d’élus locaux et de citoyens multiplient les appels pour que l’État s’engage sur ces questions d’accès aux soins.
Des solutions locales face aux carences nationales
De longue date, les élus inquiets, pour ne pas dire en colère, cherchent à pallier les carences de l’État en dépit du peu de moyens financiers, juridiques et techniques dont ils disposent pour améliorer l’accès aux soins. C’est ainsi qu’historiquement
les communes et leurs groupements – mais aussi les mutuelles – ont créé des centres de santé pour remédier aux déserts médicaux et à l’isolement des professionnels de santé. Aujourd’hui, de nouvelles initiatives voient le jour, comme la création de maisons de santé pluri-professionnelles (MSP), qui sont des structures privées au sein desquelles les médecins exercent
une activité libérale, contrairement aux centres de santé qui emploient des médecins salariés. Certaines communes ont mis en place des dispositifs de santé itinérants, parfois sous la forme de bus allant de village en village.
D’autres, plutôt que de financer des structures fixes ou itinérantes, cherchent à favoriser l’installation des médecins en leur offrant logement, aide à l’emploi du conjoint, cadre de vie. Autant d’idées et d’initiatives que le ministère de tutelle et le gouvernement ne pourraient-ils pas organiser à l’échelle nationale ?